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Louis Aragon, Les mains d'Elsa
Donne-moi tes mains pour l'inquiétude Donne-moi tes mains dont j'ai tant
rêvé Dont j'ai tant rêvé dans ma solitude Donne-moi
te mains que je sois sauvé Lorsque je les prends à mon pauvre
piège De paume et de peur de hâte et d'émoi Lorsque je les
prends comme une eau de neige Qui fond de partout dans mes main à moi
Sauras-tu jamais ce qui me traverse Ce qui me bouleverse et qui m'envahit Sauras-tu
jamais ce qui me transperce Ce que j'ai trahi quand j'ai tresailli Ce que dit
ainsi le profond langage Ce parler muet de sens animaux Sans bouche et sans
yeux miroir sans image Ce frémir d'aimer qui n'a pas de mots Sauras-tu
jamais ce que les doigts pensent D'une proie entre eux un instant tenue Sauras-tu
jamais ce que leur silence Un éclair aura connu d'inconnu Donne-moi tes
mains que mon coeur s'y forme S'y taise le monde au moins un moment Donne-moi
tes mains que mon âme y dorme Que mon âme y dorme éternellement.
La nuit ! La nuit surtout je ne rêve pas je vois J'entends je marche au bord du trou J'entends gronderCe sont les pierres qui se détachent des années La nuit nul ne prend garde C'est tout un pan de l'avenir qui se lézarde Et rien ne vivra plus en moi Comme un moulin qui tourne à vide L'éternité De grandes belles filles qui ne sont pas nées Se donneront pour rien dans les bois Des hommes que je ne connaîtrai jamais Battront les cartes sous la lampe un soir de gel Qu'est-ce que j'aurai gagné à être éternel? Les lunes et les siècles passeront Un million d'années ce n'est rien Mais ne plus avoir ce tremblement de la main Qui se dispose à cueillir des oeufs dans la haie Plus d'envie plus d'orgueil tout l'être satisfait Et toujours la même heure imbécile à la montre Plus de départs à jeun pour d'obscures rencontres Je me dresse comme un ressort tout neuf dans mon lit Je suis debout dans la nuit noire et je m'agrippe A des lampions à des fantômes pas solides Où la lucarne ? Je veux fuir ! Où l'écoutille ? Et je m'attache à cette étoile qui scintille Comme un silex en pointe dans le flanc Ivrogne de la vie qui conjugue au présent Le liseron du jour et le fer de la grille.
Zadounaïsky
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