NICO,Nicolas ZADOUNAISKY, oeuvres sur papier, dessins, collages, photomontages,cartes postales

Des idées de cadeaux pour la saint valentin, les anniversaires, la fête des mères, noël, etc.

animaux bleu blanc rouge c'est la vie couples erotisme inri misere paris ma muse personnages portraits religion toros voyages actualité cartes postales

Zadounaïsky

NICO, Nicolas ZADOUNAISKY

Un croquis informe sort de dessous sa main ; il se dépite ; il recommence son ouvrage, et le déchire encore. Alors il s'aperçoit qu'il y a des principes qu'il ignore ; il est forcé de convenir qu'il lui faut un maître : mais un pareil élève ne demeurera pas long temps aux principes, et il avancera à pas de géant dans une carrière où l'inspiration aura été son premier guide. Le peintre qui représente la nature humaine doit s'occuper de l'étude des passions : si l'on ne connaît le coeur de l'homme, on connaîtra mal son visage. Le paysage a sa partie morale et intellectuelle comme le portrait ; il faut qu'il parle aussi, et qu'à travers l'exécution matérielle on éprouve ou les rêveries ou les sentiments que font naître les différents sites. Il n'est pas indifférent de peindre dans un paysage, par exemple, des chênes ou des saules, les chênes à la longue vie, durando saecula vincit, aux écorces rudes, aux bras vigoureux, à la tête altière, immota manet, inspirent sous leurs ombres des sentiments d'une tout autre espèce que ces saules au feuillage léger, qui vivent peu et qui ont la fraîcheur des ondes où ils puisent leur sève : umbrae irrigui fontis amica salix.

Quelquefois le paysagiste, comme le poète, faute d'avoir étudié la nature, viole le caractère des sites. Il place des pins au bord d'un ruisseau et des peupliers sur la montagne ; il répand la corbeille de la Flore de nos jardins dans les prairies ; l'églantier d'une haie sauvage porte la rose de nos parterres, couronne trop pesante pour lui. L'étude de la botanique me semble utile au paysagiste, quand ce ne serait que pour apprendre le feuillé et ne pas donner aux feuilles de tous les arbres le même limbe et la même forme. Si le peintre qui doit exprimer sur la toile les tristes passions des hommes est obligé d'en rechercher les organes à l'aide de l'anatomie, plus heureux que lui, le peintre de paysage ne doit s'occuper que des générations innocentes des fleurs, des inclinations des plantes et des moeurs paisibles des animaux rustiques. Lorsque l'élève aura franchi les premières barrières, quand son pinceau, plus hardi, pourra errer sans guide avec ses pensées, il faudra qu'il s'enfonce dans la solitude ; qu'il quitte ces plaines déshonorées par le voisinage de nos villes. Son imagination, plus grande que cette petite nature, finirait par lui donner du mépris pour la nature même ; il croirait faire mieux que la création : erreur dangereuse par laquelle il serait entraîné loin du vrai dans des productions bizarres, qu'il prendrait pour du génie.

Gardons-nous de croire que notre imagination est plus féconde et plus riche que la nature. Ce que nous appelons grand dans notre tête est presque toujours du désordre. Ainsi, dans l'art qui fait le sujet de cette lettre, pour nous représenter le grand, nous nous figurons des montagnes entassées jusqu'aux cieux, des torrents, des précipices, la mer agitée, des flots si vastes que nous ne les voyons que dans le vague de nos pensées, des vents, des tonnerres ; que sais-je ? un million de choses incohérentes et presque ridicules, si nous voulions être de bonne foi et nous rendre un compte net et clair de nos idées. Cela ne serait-il point une preuve du penchant que l'homme a pour détruire ? Il nous est bien plus facile de nous faire des notions du chaos que des justes proportions de l'univers. Nous avons toutes les peines du monde à nous peindre le calme des flots, à moins que nous n'y mêlions des souvenirs de terreur : c'est ce dont on se peut convaincre par la description de ces calmes où l'on trouve presque toujours les mots de menaçant, de profond silence, etc.

NICO, Nicolas ZADOUNAISKY

Que, rempli de ces folles idées du sublime, un paysagiste arrive pendant un orage au bord de la mer qu'il n'a jamais vue, il est tout étonné d'apercevoir des vagues qui s'enflent, s'approchent et se déroulent avec ordre et majesté l'une après l'autre, au lieu de ce choc et de ce bouleversement qu'il s'était représentés. Un bruit sourd, mêlé de quelques sons rauques et clairs entrecoupés de quelques courts silences, a succédé au tintamarre que notre peintre entendait dans son cerveau. Partout des couleurs tranchantes, mais conservant des harmonies jusque dans leurs disparates. L'écume éblouissante des flots jaillit sur des rochers noirs ; dans un horizon sombre roulent de vastes nuages, mais qui sont poussés du même côté : ce ne sont plus mille vents déchaînés qui se combattent, des couleurs brouillées, des cieux escaladés par les flots, la lumière épouvantant les morts à travers les abîmes creusés entre les vagues. Notre jeune poète ou notre jeune peintre s'écrie : " J'imaginais mieux que cela ; " et il tourne le dos avec dédain. Mais si son esprit est bon, il reviendra bientôt de ses notions exagérées ; il rectifiera son imagination ; rien ne lui paraîtra plus grand désormais que les ouvrages formés par une puissance première. Il renversera ces montagnes entassées dans sa tête, où tous les sites, tous les accidents, tous les végétaux, étaient confondus. Ces montagnes idéales ne s'élèveront plus jusqu'aux étoiles, mais les neiges couvriront la tête des Alpes, les torrents s'écouleront de leur cime ; les mélèzes, dans une régions moins élevée, commenceront à décorer le flanc des rochers ; des végétaux, moins robustes, quittant le séjour des tempêtes, descendront par degrés dans la vallée, et la cabane du Suisse agricole et guerrier sourira sous les saules grisâtres au bord du ruisseau. Fort alors de ses études et de son goût épuré, l'élève se livrera à son génie.

Tantôt il égarera les yeux de l'amateur sous des pins où peut-être un tombeau couvert de lierre appellera en vain l'amitié ; tantôt dans un vallon étroit, entouré de rochers nus, il placera les restes d'un vieux château : à travers les crevasses des tours on apercevra le tronc de l'arbre solitaire qui a envahi la demeure du bruit et des combats ; le perce-pierre couvrira de ses croix blanches les débris écroulés, et les capillaires tapisseront les pans de murs encore debout. Peut-être un petit pâtre gardera dans ce lieu ses chèvres, qui sauteront de ruine en ruine. Les paysages riants auront leur tour, quoiqu'en général ils soient moins attachants dans leur composition, soit que l'image du bonheur convienne peu aux hommes, soit que l'art ne trouve que de faibles ressources dans la peinture des plaisirs champêtres, réduits pour la plupart à des danses et à des chants. Il y a pourtant certains caractères généraux propres à ces sortes de vues : le feuillé doit être léger et mobile, le lointain indéterminé sans être vaporeux, l'ombre peu prononcée, et il doit régner sur toute la scène une clarté suave qui veloute la surface des objets.

Le paysagiste apprendra l'influence des divers horizons sur la couleur des tableaux : si vous supposez deux vallons parfaitement identiques, dont l'un regarde le midi et l'autre le nord, les tons, la physionomie, l'expression morale de ces deux vues semblables seront dissemblables. La perspective aérienne est d'une difficulté prodigieuse ; cependant il y faut savoir placer la perspective linéaire des plans de la terre, et détacher sur les parties fuyantes les nuages, si différents aux différentes heures du jour. La nuit même a ses couleurs ; il ne suffit pas de faire la lune pâle pour la faire belle : la chaste Diane a aussi ses amours, et la pureté de ses rayons ne doit rien ôter à l'inspiration de sa lumière. Cette lettre est déjà d'une extrême longueur, et je n'ai encore qu'effleuré un sujet inépuisable. Tout ce que j'ai voulu vous dire aujourd'hui, c'est que le paysage doit être dessiné sur le nu, si on le veut faire ressemblant, et en accuser pour ainsi dire les muscles, les os et les formes. Des études de cabinet, des copies sur des copies, ne remplaceront jamais un travail d'après nature. Atticae plurimam salutem.

01   02   03   04   05   06   07   08   09   10
11   12   13   14   15   16   17   18   19   20
21   22   23   24   25   26   27   28   29   30
31   32   33   34   35   36   37   38   39   40
41   42   43   44   45   46   47   48   49   50

accueil     galeries